Dimanche 9 juin 2013 avait lieu la Commission d’Action à Monoblet.
43 personnes, issues de neuf sections, ont assisté dimanche 9 juin à la réunion de printemps de la Commission d’Action du Club Cévenol au temple de Monoblet, aimablement prêté par l’Eglise Réformée de France. La rencontre, présidée par Rémi Noël, fut remarquablement organisée par la section d’Anduze.
Rémi Noël et Philippe Castanon.
La municipalité de Monoblet était représentée par le maire Philippe Castanon et son adjoint Jacques Lin. La réunion fut introduite par Gérard Dupuis, président de la section locale, qui remercia les participants pour leur présence et introduisit le thème de la réunion sur les prédateurs et en particulier la présence du loup sur les Causses et en Cévennes «un sujet aussi orageux que le temps».
Philippe Castanon présenta rapidement sa commune de 700 habitants, connue en Cévennes pour la difficile tentative de redémarrage d’une activité de filature et de tissage de la soie. La municipalité réalise la construction d’une nouvelle école, en remplacement de l’ancienne, datant de 1896 : «un budget d’un million et demi d’euros, avec 50% d’aide par le biais de l’éco-construction, une école primaire laïque pour nos enfants, l’avenir de nos Cévennes».
Bien que le thème de la réunion fut la présence des grands prédateurs sur notre territoire, il y a eu tout d’abord la question des actions menées par la commune pour accueillir les vautours grâce à l’installation de placettes d’alimentation, notamment pour favoriser la présence migratoire du vautour percnoptère. Trois filières les alimentent en carcasses et en déchets alimentaires : les éleveurs, les chasseurs de sangliers et la Cheville Cigaloise pour les animaux de boucherie. Le site des «Jumelles» (deux sommets situés au-dessus du village) a été retenu pour les aménager, tout en respectant la réglementation des services vétérinaires. Ce projet enrichira l’offre touristique de la commune avec la création associée de sentiers de randonnée ; tout en améliorant l’hygiène du territoire parfois mise à mal par les abats de sanglier trop souvent disséminés dans la nature par les chasseurs.
Valérie Fouet, de Montoulieu, apporta son témoignage très convaincant sur l’aménagement d’aires d’alimentation dans sa propriété pour ces vautours migrateurs, aires utilisées de mars à septembre avec des apports de viandes et de poissons.
Jacques Lin présenta un montage audiovisuel sur les quatre types de vautours (moines, fauves, gypaètes et percnoptères) et leurs principales caractéristiques éthologiques (lieu de résidence, envergure, poids, comportement et longévité). Contrairement aux chiens errants et aux sangliers, les vautours ne disséminent pas les morceaux de carcasse, consommant la viande sur place.
Pour conclure cette présentation, Rémi Noël rappela qu’il ne faut pas assimiler les vautours aux prédateurs : ils ne sont que des charognards et ne consomment que des animaux morts. Comme tous leurs congénères, les vautours caussenards sont aussi de grands voyageurs, car on a pu en observer jusqu’en Europe du Nord ou en Afrique.
Jacques Lin lors de son exposé.
Quelle place pour les grands prédateurs sur les Causses et dans les Cévennes?
Quelle est la situation actuelle quant à la présence de grands prédateurs sur nos territoires? Sont-ils utiles pour l’équilibre de la nature et pour la qualité de la biodiversité? Sont-ils compatibles avec les pratiques de l’élevage? Sont-ils des atouts touristiques? Autant de questions à aborder au cours de ce débat.
L’ours est absent, même si un, de passage probablement, fut observé sur le Lingas à l’automne, il y a une dizaine d’années.
Le lynx est présent depuis au moins une trentaine d’années, mais sa discrétion proverbiale et son absence d’impact sur les espèces animales domestiques ne posent pas de problème particulier de coexistence avec les activités humaines. En effet, il ne se nourrit que de rongeurs, petits ou grands. Il peut s’attaquer aux chevreuils, aux faons ou aux marcassins et disperse les concentrations de sangliers et de cervidés en milieu forestier. C’est aussi un prédateur naturel du chat haret, du renard et des petits mustélidés. Sa présence peut donc être considérée comme très positive. Les lynx restent peu nombreux sur les Causses ou en Cévennes, car un couple occupe et défend un territoire allant de 100 à 150 km². Il s’agit du lynx dit «boréal» et non «pardelle» qui, présent en Espagne, n’a pas franchi la frontière pyrénéenne.Il faut aussi compter au nombre des prédateurs les chiens errants qui, quand ils se constituent en meute, peuvent avoir un impact notoire tant sur la faune sauvage que sur les troupeaux, ovins notamment. Ainsi, certaines années, d’après les dossiers d’assurance, on a pu constater rien qu’en Lozère près de 400 brebis victimes de ce type d’attaque.
Le retour du loup en Lozère pose un certain nombre de problèmes dans cette terre d’élevage, dont les pratiques ont connu des évolutions irréversibles depuis le XIXe siècle. Il y aurait un peu plus de 200 loups en France, essentiellement dans les Alpes, et venus spontanément d’Italie (Canis lupus italicus). Le loup d’Italie ou loup des Abruzzes ou encore loup des Apennins est une sous-espèce du loup gris. Les loups d’Italie mâles mesurent entre 100 à 140 centimètres de long, tandis que les femelles mesurent de 90 à 130 centimètres. Les adultes pèsent entre 25 et 40 kg. En Italie, ils bénéficient d’une image positive et sont mieux acceptés socialement, car à la différence du nôtre qui dévore le Petit Chaperon Rouge, une louve a sauvé les jeunes jumeaux Remus et Romulus, les fondateurs de Rome, en les allaitant.
La dynamique de leur population leur fait exercer aujourd’hui une pression vers le Massif Central. Depuis plus d’un vingtaine d’années, on observe occasionnellement sur nos territoires le passage de loups solitaires se dirigeant ensuite vers les Pyrénées catalanes. Aujourd’hui, certains individus semblent chercher à s’installer dans nos montagnes.
Après avoir décimé les populations de mouflons dans les gorges du Tarn, un ou deux individus semblent, l’an passé, avoir attaqué certains troupeaux du Causse Méjean. Un autre individu semble avoir aussi été observé sur le Mont Lozère. Une petite meute paraît aussi vouloir s’installer en Haute-Loire, en bordure des gorges de l’Allier. Il est aussi présent dans le Cantal et, tout récemment, il a été observé sur le Larzac et dans les Monts de Lacaune.
Pat Valette, Claude Milan, Rémi Noël, Philippe Castanon(caché), Jacques Lin, Gérard Dupuis et Valérie Fouet.
Comment gérer cette présence, sachant d’une part que le loup est protégé en Europe par la Convention de Berne, dont la France est signataire, et que d’autre part, nous savons depuis La Fontaine qu’entre le loup et l’agneau, c’est toujours la raison du plus fort qui l’emporte…
Or il est indispensable de maintenir et de développer un élevage extensif pour entretenir les paysages de nos territoires qui viennent d’être inscrits au Patrimoine Mondial de l’Humanité de l’Unesco au titre de l’agropastoralisme. Cette forme d’élevage est difficilement compatible avec la présence de nombreux loups, situation qui a conduit le conseil d’administration du Parc National des Cévennes à se prononcer contre le maintien du loup sur son territoire.
Par ailleurs, certains scientifiques s’étonnent de cette position d’un parc national qui, par nature, doit en priorité contribuer au maintien d’une biodiversité de plus en plus menacée à l’échelle de la planète. Voilà donc toutes les contradictions qu’il faut prendre en compte pour tenter de traiter ce problème.
Manoël Atman, président d’Alliance avec les loups, présenta cette association lozérienne de Langogne dont le but est de favoriser la cohabitation du loup avec l’homme. Elle se donne pour mission la protection du loup au travers d’actions concrètes et concertées avec les acteurs du monde rural, comme le camping au troupeau, le recensement des observations, l’appel au bénévolat pour trouver des bergers ou bergères volontaires.
Par cette action, l’association veut soutenir les éleveurs face aux dégâts que peuvent ponctuellement occasionner les loups sur les troupeaux. Plus généralement, elle veut participer au changement de perception et de représentation du loup dans notre société, en produisant des événements culturels autour du loup et en élaborant un label de qualité environnementale. Elle invite toutes celles et ceux qui sont favorables à une cohabitation avec le loup à la rejoindre.
Manoël Atman constata que cet objectif est difficile à atteindre, tout dialogue avec les éleveurs lozériens sur cette question semblant aujourd’hui impossible dans un contexte encore très passionnel. Il présenta aussi les différentes techniques de protection contre le loup : pose de filets de protection électriques, réhabilitation du métier de berger, parcs de regroupement nocturne, utilisation de chiens «patous», systèmes d’effarouchement, tirs de dissuasion pour éloigner les loups…
Pour Manoël Atman, «la vraie difficulté est d’établir le dialogue avec les syndicats agricoles et les éleveurs». Il souhaite que des associations comme le Club Cévenol soient des médiateurs efficaces pour examiner sereinement ces questions.
Après débat, la Commission d’Action du Club Cévenol recommanda que le Conseil d’Administration se positionne sur cette question délicate. Il devra tenir compte non seulement des dispositions de la Convention de Berne, qui protège le loup tout en autorisant des tirs de régulation lorsqu’un troupeau est régulièrement attaqué ; mais aussi des travaux de scientifiques montrant tout l’intérêt à conserver des pratiques agropastorales vivantes et propices au maintien de la biodiversité des milieux ouverts qu’elles ont créés face à la forêt.
Or la présence du loup, compliquant le travail des éleveurs, peut fragiliser certaines exploitations dans le contexte économique actuel.
Le Club Cévenol, fidèle à ses statuts bien connus, ne peut que soutenir toute disposition propice à conforter la vie des populations cévenoles et caussenardes, nécessaires au maintien des patrimoines naturels et culturels de ce territoire, hérités du travail des générations précédentes.
Vœux des Sections du Club Cévenol
Chemin Urbain V
Il se crée actuellement un chemin de randonnée de Nasbinals à Avignon. Pierre Julien, de la section de Montpellier, s’étonne qu’il ne passe pas par l’église de Saint-Flour-du-Pompidou, remarquablement agrandie au XIVe siècle par Urbain V.
La Commission d’Action recommande que le Club Cévenol intervienne officiellement auprès des porteurs partenaires de ce projet (Association des Amis du bienheureux pape Urbain V, Conseil Général de la Lozère, Parc National des Cévennes, Fédération Française de la Randonnée Pédestre) afin d’obtenir la création d’une variante de ce sentier passant par Le Pompidou et son église de Saint-Flour.
L’après-midi, David Steinfeld montre la maquette d’une baleine destinée à un parc de jeux pour enfants.
Dégâts causés par les sangliers
Le Club Cévenol est régulièrement saisi du problème des dégâts causés par les sangliers. La dernière plainte à ce sujet émane de Monsieur F. Robert de Sainte-Cécile-d’Andorge. Ils détruisent les récoltes, les bancels, les murets, retournent les chemins et les pelouses. Leur prolificité actuelle est liée au croisement effectué il y a plusieurs années par les sociétés de chasse locales avec le porc domestique. Aujourd’hui, il y a davantage de «cochongliers» que de sangliers sauvages qui peuplent les Cévennes.
La Commission d’Action recommande que le Club Cévenol saisisse les autorités compétentes pour obtenir une régulation rigoureuse des populations de sangliers, y compris en dehors des périodes de chasse, afin de stopper leur prolifération en l’absence de grands prédateurs pouvant y contribuer.
Pôle Nature de l’Aigoual
Cet ambitieux projet d’aménagement de l’Aigoual, porté dans son ensemble par la Communauté de Communes Causses-Aigoual, vise à renforcer l’offre touristique du massif sur les quatre saisons. Deux chargés de missions viennent d’être embauchés à cette fin. La section de Saint-Jean-du-Gard émet le vœu de voir le Club Cévenol représenté dans le comité de pilotage de ce projet.
La Commission d’Action recommande que le Club Cévenol sollicite ladite Communauté de Communes à cet effet et mandate Christian Rebotier pour le représenter.
Centre Météo de l’Aigoual
Des menaces semblent peser sur la pérennisation des emplois sur ce site que Météo France envisagerait de fermer, la transmission des données météo pouvant actuellement se faire sans problème par télémétrie. La section de Saint-Jean-du-Gard émet le vœu de voir le Club Cévenol intervenir vigoureusement auprès de Météo France pour obtenir des garanties quant au maintien des emplois sur ce site patrimonial emblématique, garantissant son ouverture sur l’ensemble de l’année.
La Commission d’Action recommande que le Club Cévenol y procède par une motion officielle de son Conseil d’Administration adressée aux autorités de Météo France, en attirant leur attention sur le rôle pédagogique irremplaçable de ses personnels dans ce site touristique majeur.
Voie Verte Anduze –La Madeleine – Tornac
La section d’Anduze émet le vœu de voir l’ancienne voie de chemin de fer Quissac – Anduze réutilisée partiellement en voie verte, notamment sur le tronçon de Tornac à Anduze. La réouverture de cet axe aux randonnées non motorisées enrichirait l’offre touristique locale.
La Commission d’Action recommande que le Club Cévenol intervienne en ce sens auprès des communautés de communes et des mairies concernées pour soutenir cette proposition.
L’après-midi, des dauphins chez David Steinfeld.
Projet de publicité «Vase d’Anduze en chocolat»
La section d’Anduze émet le vœu de voir les commerçants et restaurateurs de cette cité proposer des vases d’Anduze en chocolat, qui contribueraient à augmenter la notoriété de son territoire. Une société de Saint-Christol-lez-Alès pourrait aisément les fabriquer.
La Commission d’Action estime que ce projet de promotion commerciale privée n’entre pas dans les compétences du Club Cévenol. Il appartient aux autorités communales, si elles le souhaitent, de prendre à cet effet tout contact utile avec le chocolatier concerné.
L’ordre du jour étant épuisé, le président de la Commission d’Action a clos les travaux en remerciant toutes les personnes présentes de leur participation.
Après l’excellent déjeuner pris dans une auberge de Saint-Hippolyte-du-Fort, les participants visitèrent l’atelier du sculpteur David Steinfeld, situé à Monoblet. Travaillant à la demande, il exécute des œuvres en bois de thuya monumentales, de toute beauté, et approvisionne parcs d’attractions et jardins d’agrément de notre région, comme ces sculptures d’animaux au zoo du Lunaret à Montpellier ou celles du Parc des Châtaigniers au Vigan.
Photos de Pierre VALETTE, texte de Pierre VALETTE et Rémi NOEL.
Le «jardin extraordinaire» de David Steinfeld.